Les prétendus droits de douane « réciproques » américains, destinés à remodeler l'ordre économique libéral, sont entrés en vigueur ce mercredi matin, portant un coup dur à l'économie mondiale et, dans l'immédiat, aux marchés financiers. Des tarifs douaniers à l'importation frappent une soixantaine de partenaires commerciaux affichant des excédents commerciaux avec les Etats-Unis avec un taux allant de 11 % à 50 %, comme l'Union européenne à 20 % ou le Vietnam à 46 %. Des montants énormes, mais bien loin de la surtaxe exorbitante de 104 % qui touche désormais les produits importés de Chine. Ces mesures portent les droits de douane à leur plus haut niveau depuis plus d'un siècle.
« Je sais ce que je fais », prétend le président américain. Mais le monde économique et financier en doute. Paul Krugman, lauréat du prix Nobel d'économie en 2008, parle même de « stupidité malveillante » de l'administration Trump à un moment où « le sort de l'économie mondiale est en jeu ». « Trump n'essaie pas vraiment d'atteindre des objectifs économiques […] Tout cela doit être considéré comme une démonstration de domination, destinée à choquer et à impressionner et à faire ramper les gens ».
Avec l'accélération brutale de la guerre commerciale, les bourses du monde entier passent au rouge. Les premières à avoir réagi sont évidemment les places asiatiques, les seules ouvertes pour le moment. L'indice vedette Nikkei à Tokyo chute de 3,5 %, à Séoul, le Kospi sud-coréen recule de 1,9 % et le Taiex taïwanais plonge de 5,8 %. Les places chinoises résistent : les indices CSI 300 et SSEC gagnent environ 1 % tandis que Hong Kong est stable.
Les bons du Trésor n'ont pas la cote
Les contrats à terme sur le Cac 40 décrochent. Une chute d'environ 3,3 % est à prévoir pour l'indice de référence à la Bourse de Paris. Les futures de Wall Street reculent d'au moins 1,5 %. Le yen, l'euro et le franc suisse sont les devises privilégiées des investisseurs nerveux. La fuite vers la sécurité ne profite plus aux bons du Trésor américain, ce qui est particulièrement évident sur la partie longue de la courbe. Le rendement du titre à 30 ans progresse encore de 19 points de base ce matin (après avoir déjà pris de 35,6 points sur les deux séances précédentes, la hausse la plus rapide depuis mars 2020, précise Deutsche Bank). Les économistes d'ING ont déclaré que la stratégie de « vendre américain » domine désormais le thème du risque croissant de récession, qui aurait normalement fait baisser les rendements.
La Réserve fédérale est confrontée à une tâche de plus en plus ardue. Economistes, chefs d'entreprise et investisseurs parient que l'incertitude créée par la mise en oeuvre d'un protectionnisme radical des Etats-Unis poussera l'économie vers une récession en affaiblissant l'embauche et la consommation. Et dans le même temps, l'ampleur des droits de douane est susceptible d'entraîner une hausse substantielle des prix de nombreux biens et matériaux importés. Une combinaison qui devrait maintenir la banque centrale sur la touche selon les prévisions de Morgan Stanley.
Source Investir